Tu es développeur et tu as parfois l’impression de ne pas être légitime ? De ne pas être aussi compétent que tes collègues ? D’avoir « fraudé » ton poste et qu’un jour tout le monde s’en rendra compte ?
Tu n’es pas seul. Tu vis probablement ce qu’on appelle le syndrome de l’imposteur. C’est un sentiment que j’ai également expérimenté et je vais t’expliquer comment y faire face.
Temps de lecture estimé : 7 minutes
C’est quoi le syndrome de l’imposteur ?
Le syndrome de l’imposteur est un phénomène psychologique qui pousse une personne à douter de ses compétences et à attribuer son succès à des facteurs externes comme la chance, les relations ou le hasard.
📚 Terme défini pour la première fois en 1978 par les psychologues Pauline Clance et Suzanne Imes (source : American Psychological Association)
Le syndrome de l’imposteur est très répandu dans les milieux techniques, notamment chez les développeurs, qu’ils soient juniors ou seniors.
Pour ma part, j’ai commencé à en ressentir les effets dès mes années d’études : cette peur de ne pas réussir, de ne pas être à la hauteur, ou de ne pas me sentir légitime pour avancer. C’est un sentiment insidieux, qui peut devenir si envahissant qu’on finit par y croire. Et quand on y croit, on finit parfois par abandonner… alors qu’il n’en avait pas le droit.
Pourquoi les développeurs sont-ils si souvent touchés ?
1. Un monde en constante évolution
- Le web et le développement évoluent à une vitesse folle : nouveaux frameworks, bibliothèques, langages, et toujours un collègue pour te présenter une « super » techno révolutionnaire.
- Aujourd’hui, un développeur web a l’impression qu’il doit tout connaître pour rester légitime dans son métier. Mais la réalité, c’est que l’écosystème s’est tellement complexifié qu’il est tout simplement impossible de tout maîtriser.
- On se met à tort la pression de tout savoir faire, alors même que les technologies avancent plus vite que notre capacité à tout suivre.
- Ce décalage nourrit un sentiment d’incompétence permanent — même chez les développeurs les plus expérimentés.
💬 « Dès que j’ai appris un outil, deux nouveaux apparaissent. » — Tout développeur, un jour.
2. La comparaison constante
- Les réseaux sociaux, GitHub ou Stack Overflow exposent constamment des projets incroyables. On a l’impression qu’on n’en fait pas assez par rapport à eux.
- On se compare à des développeurs qui montrent leur meilleur travail, pas leurs erreurs. C’est encore plus vrai sur des réseaux sociaux tels que LinkedIn.
3. Une culture de l’excellence
- Le métier est souvent présenté comme une quête de performance : clean code, tests, performance, scalabilité…
- On oublie que les erreurs font partie du processus. Ne pas savoir faire quelque chose est simplement une occasion de l’apprendre, pas une preuve d’incompétence.
4. Une formation souvent autodidacte
- Beaucoup de développeurs se forment seuls ou en reconversion, cela pousse davantage à penser qu’on est pas légitime, que ce que nous avons appris n’est peut être pas à appliquer dans le monde « professionnel », que ce n’est pas suffisant.
- Cela renforce le sentiment de ne pas être un « vrai développeur », surtout si nous n’avons aucun diplôme à présenter.
Les signes du syndrome de l’imposteur
- Tu penses que tu ne mérites pas ton job.
- Tu crains que tes collègues découvrent « la vérité ».
- Tu hésites à demander de l’aide de peur d’être jugé.
- Tu travailles plus pour « compenser » ton sentiment d’incompétence.
- Tu minimises tes réussites.
- Tu as constamment des doutes sur tes capacités à réaliser ce qui est demandé.
- Tu ressens une peur lorsque tu te projettes en tant que développeur professionnel.
Comment s’en libérer ?
1. Reconnaître que c’est normal
- Le syndrome de l’imposteur touche 70 % des personnes au moins une fois dans leur vie.
- Il touche aussi les meilleurs développeurs.
- Tu n’es pas seul et de très loin.
Exemple : David Heinemeier Hansson, créateur de Ruby on Rails, a dit dans une interview avoir ressenti ce syndrome.
2. Parler avec d’autres développeurs
- Les échanges humains brisent l’isolement.
- Tu te rendras compte que tout le monde doute parfois.
- Participer à des communautés (forums, Discord, meetups) aide à relativiser.
- Regarder des vidéos autour du sujet pour se rendre compte à quel point ce sentiment est normal et que cela ne vient pas de tes compétences.
3. Accepter de ne pas tout savoir
- Personne ne connaît tout. Même les seniors googlent tous les jours, même pour des choses simples !
- Le métier n’est pas de tout savoir, mais de savoir apprendre et résoudre des problèmes. Le plus important, c’est de savoir effectuer les recherches nécessaires et de proposer une solution optimale en terme de coût et de temps.
Astuce : documente ce que tu apprends. Cela te rappellera ton cheminement.
4. Tenir un journal de tes réussites
- Liste chaque semaine ce que tu as appris, résolu ou compris.
- Cela ancre une image positive de toi-même et montre ta progression.
Par exemple, j’utilise Notion pour documenter ce que j’ai appris, cela m’aide à mettre au clair ce que j’ai appliqué, mais également de me souvenir de la procédure en revenant dessus quelques mois plus tard.
5. Revoir ton discours intérieur
- Remplace les pensées comme “je suis nul” par :
- “je suis encore en train d’apprendre”
- “je ne connais pas ça, mais je peux le découvrir”
- C’est un changement de mentalité : du mode “jugement” au mode “progression”.
Exemple concret
Avant :
Tu ne sais pas comment déployer une API REST sur un serveur. Tu te dis :
“Je suis vraiment nul, je ne mérite pas ce poste.”
Après :
Tu reconnais que tu n’as jamais eu à le faire, donc tu apprends via un tutoriel. Tu te dis :
“C’est un nouveau sujet. J’ai déjà appris d’autres choses, je peux apprendre ça aussi.”
Ressources utiles
- 📘 The Impostor Syndrome Survival Guide – Dr. Valerie Young
- 🎧 Podcast Developer Tea – Impostor Syndrome
- 🛠️ Article : GitHub Blog – Overcoming Impostor Syndrome
Conclusion
Le syndrome de l’imposteur n’est pas une preuve d’incompétence, mais plutôt un symptôme d’un esprit conscient et exigeant.
Il faut apprendre à le reconnaître, l’apprivoiser, et ne pas le laisser diriger nos décisions.
Durant mes études, j’ai côtoyé une personne très intelligente et particulièrement douée dans son domaine. Pourtant, cela ne l’a pas empêchée de douter d’elle-même au point d’abandonner ses études.
J’ai essayé de la soutenir, je lui ai même dit que je la trouvais bien plus compétente que moi dans tout ce qui touche à l’administration système. Mais elle s’est malheureusement laissée submerger par le syndrome de l’imposteur, et a finalement préféré tout arrêter.
C’est pour cela qu’il est essentiel de s’informer sur ce sujet et d’en parler autour de soi. Comprendre que ce sentiment est courant permet d’en prendre du recul, d’adopter un autre état d’esprit, et de ne pas laisser ce doute ruiner un avenir qui est, en réalité, plein de promesses.
Être développeur, c’est avant tout être en perpétuel apprentissage, pas être un dictionnaire vivant de toutes les technologies.
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